Discours gouvernemental : la violence gagne du terrain
Written by laila laila_djamilatou on 3 octobre 2023
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Par Roland TSAPI
En l’espace de 24 heures, deux ministres du gouvernement font des adresses publiques, avec un ton guerrier, expliqué comme correspondant au contexte du moment. De quoi se demander qui a déclenché la guerre et contre qui, pour comprendre que le langage de la violence que condamne le gouvernement est pourtant plus pratiqué en son sein, où règne désormais une panique sourde.
Il n’a échappé à personne, la sortie le 25 septembre 2023 du ministre de la Communication, visiblement offusqué de ce que les Camerounais parlent des coups d’Etats qui secouent les pays francophones d’Afrique depuis 2020. Ces pays partageant un passé colonial et post colonial commun avec le Cameroun, les analogies s’imposent comme toute conclusion logique.
Si l’homme est mortel et que je suis un homme, je suis mortel, suivant le syllogisme d’Aristote. Mais d’après le ministre de la Communication, de tels parallèles sont insensés dans le cas d’espèce, et pourraient s’apparenter à des appels à la déstabilisation de l’Etat et de ce fait justifier des interpellations et traductions devant la justice.
Le lendemain 26 septembre, c’est le ministre de l’administration territoriale Paul Atanga Nji qui faisait appel à l’image d’un rouleau compresseur broyant sans état d’âme tout ce qui se trouvait sur son chemin, comparant la force de l’ordre à une machine réduisant en pâte ceux qui ne se pliaient pas aux règles.
Les discours intimidants, des actes aussi, on en a connait d’ailleurs de plus en plus depuis la rentrée scolaire 2023/2024. Les enseignants membres du mouvement «On a Trop Supporté » ont choisi cette période de rentrée, pour rappeler au gouvernement qu’il y avait un contentieux non liquidé, celui contenu dans les instructions présidentielles de mars 2022 relatives à l’apurement complet des dettes dues, financières et administratives.
Dans les unités administratives locales, les autorités, au lieu d’engager le dialogue pour dissuader les grévistes, se sont mises à jouer aux plus royalistes que le roi, dressant des listes des enseignants «délinquants» pour certains proviseurs à l’attention de leurs hiérarchies, adressant des convocations policières aux enseignants pour certains éléments de la force de l’ordre, ou instruisant les préfets de quadriller le mouvement pour éviter la contagion pour un gouverneur de région.
Les enseignants n’ont en relativité fait face qu’à un langage de violence frontale au niveau local, avant l’intervention des ministres concernés qui à leur niveau ont usé d’une violence plus douce, qui consiste à caresser pour endormir.
A bien y voir, la guerre tous azimut que redoute le gouvernement désormais, les conditions pour la déclencher ont été créées par lui-même. La situation précaire des enseignants n’est pas née de rien mais bien de la décision de retenir un tiers de leurs salaires par exemple pendant que tous les autres fonctionnaires nouvellement intégrés touchaient leurs soldes complètes, les motos taxi devenues un risque ont bien été nourries et entretenues par le pouvoir pour assouvir des desseins électoralistes, la misère ambiante au Cameroun à l’origine d’une grogne sourde est à mettre à l’actif du même gouvernement.
Dans la vie courante, il est souvent expliqué que l’homme qui se reproche quelque chose rentre chez lui en grondant, pour masquer sa panique et intimider la maisonnée. Avec le langage violent qui se développe au sein du gouvernement, en sommes-nous si éloignés ?