Pouvoir au Gabon : à la quête de l’onction des doyens ?

Le nouveau président du Gabon a choisi les pays frontaliers au sien pour ses premières sorties officielles. Après la Guinée Equatoriale et le Congo, c’est au tour du Cameroun, malgré la condamnation de Yaoundé des méthodes qu’il a utilisé pour être au pouvoir. De quoi penser qu’Oligui Nguema est en quête de l’onction des vieux, pour mieux assoir son pouvoir.

Une brève visite, mais une visite toute de même, un peu comme un nouveau recru dans une entreprise qui vient faire allégeance aux doyens de la maison. Après la Guinée Equatoriale et la République du Congo, Brice Clotaire Oligui Nguema, président de la transition gabonaise poursuit la visite des pays qui partagent les frontières avec son pays. Officiellement, les relations d’amitié et de fraternité sont avancées comme prétexte, mais il est évident que le jeune président gabonais arrivé au pouvoir après avoir renversé Ali Bongo, tient à rassurer ses voisins sur les maintiens des bonnes relations, malgré la différence de génération et sans doute d’idéologie. Il faut dire qu’au regard du parcours des chefs d’Etats qui l’entourent, il apparait comme un novice, un jeune révolutionnaire au milieu des vieux caciques qui s’accrochent désespérément au pouvoir chacun de son côté, que ce soit au Congo avec Sassou Nguesso, qui à 80 ans cumule déjà  39 ans de pouvoir, de 1979 à 1991 et depuis 1997 jusqu’à date, en Guinée Equatoriale où Théodoro Obiang Nguema, 81 ans avec 44 ans de pouvoir ou au Cameroun ou Paul Biya, qui à 90 ans entame son 41eme année au pouvoir.

Il y a cependant une différence pour ce qui est du Cameroun. Si dans les deux autres pays où il est déjà allé, les chefs d’Etats sont aussi arrivés au pouvoir par un coup d’Etat, la situation n’est pas la même chez Paul Biya qui a hérité du pouvoir suivant l’ordre constitutionnel, selon l’expression en vogue. Mais dans l’ensemble, ces portraits des autres chefs d’Etats font d’Oligui Nguema un étranger dans la bergerie, qui a forcément besoin de se faire accepter et rassurer les uns et les autres. Le chef de l’Etat gabonais a en effet pris les rênes du pays dans un contexte de rejets des dynasties régnantes dans la sous-région, ce qui logiquement provoquerait une méfiance à son égard, mais son arrivée chez le plus âgé du groupe, qui ont tous accepté de le recevoir, peut être une façon de l’encourager d’avoir eu le mérite de bousculer les vieilles habitudes,  ces visites peuvent aussi être aussi compris comme une attitude de respect et d’allégeance propre à la culture bantou. Mais comme l’appétit vient en mangeant, au-delà de toutes les considérations diplomatiques et de voisinage, n’y a-t-il pas lieu de penser aussi que le jeune président du Gabon vient voir le vieux sage, pour être imprégné des secrets de longévité au pouvoir ?

Roland TSAPI